Elle voudrait à défaut de réaliser ses rêves, les caresser du bout des doigts. Pourtant, elle sait qu'elle ne pourra jamais quitter Paris. Parce qu'elle n'a pas d'argent, parce qu'elle n'a pas d'avenir. Parce qu'elle est tout simplement condamnée à vivre cette sempiternelle existence qui ne mène a rien. Et surtout parce que la lâcheté est ancrée si profondément dans son code génétique, qu'elle ne peut esquisser un choix sans émettre un doute ou se remettre en question. Alors, elle vit. Ou plutôt elle survie. Et dans les limbes de sa vie, elle ne respire que quand elle se détruit. Car pour capter la beauté du monde, elle boit, fume et plane. Alors, on la juge parce qu'elle préfère fuir la réalité. On la traite de cause perdue. Mais elle ne leur en veut pas, comment le pourrait-elle d'ailleurs ? Elle en est consciente. Et puis elle est beaucoup trop fière pour craquer devant eux. Ça leur ferait bien trop plaisir. Non, elle ne leur accorderait pas cette chance. Beaucoup trop d'arrogance dans un si petit corps. Beaucoup trop de confiance à tord. Oh oui, de l'arrogance, elle en à revendre. C'est sa seule défense contre le reste du monde. En plus de son insolence. Elle n'a pas eu la chance de vivre dans une famille heureuse. Elle n'était pas un enfant choyé et aimé. Elle ne connait que les cris et les pleurs, le bourbon et les clopes, les factures et les fins de mois sans un sous. Sa mère a eu son frère en premier, beaucoup trop tôt. Elle croyait que la vie de famille était ce qu'il lui fallait. Qu'elle serait une bonne mère pour ses enfants. Qu'elle ferait une bonne femme au foyer. Alors, elle a eu un deuxième enfant. Et Nyméria fut la troisième et la dernière. Avant que sa maternelle ne se rende compte, que cette vie ne lui convenait pas. Ne lui convenait plus. Elle est tout simplement partie loin d'eux, loin d'elle. Alors, qu'elle n'était qu'une enfant. Pour courir après cette chimère, celui de devenir une chanteuse. Parce qu'elle avait la voix d'un ange, une voix qui vous subjugue toute la nuit. Nyméria s'en rappelle encore quand la mélancolie du passé tape à sa porte, dans ses moments les plus faibles. Quand elle lui chantait du Nina pour l'apaiser le soir ou les cauchemars étaient trop violents. "Feling good » reste sa chanson préférée même si elle lui rappelle une époque révolue à présent. Une enfance tragique qui la transformée en jeune femme un peu cassée, qui s'accoutume de cette accablante solitude. Cette même solitude qu'elle cultive depuis presque toujours. Elle n'est rien d'autre que de la mauvaise graine, n'est-ce pas ? Alors pourquoi s'approcher d'elle, hein ? Parce qu'au-delà de cette apparence hargneuse, Nyméria ne laisse personne indifférente. Elle est le genre de meuf qui vous pousse à tous lâcher pour vivre l'instant présent. Parce que rien ne compte plus que saisir cette pause que la vie peut accorder quand elle n'est pas trop occupée à vous planter un couteau dans le dos. C'est comme ça qu'elle survie, grâce à ces petits moments. Elle est peut-être une mauvaise fréquentation mais, elle ne connait pas d'autre mode de vie. Personne ne lui a montré l'exemple. Mais malgré cela, elle a cette aura. Indéfinissable. Qui fascine, qui charme. Cette manière de regarder les autres. Un mélange d'insolence et de provocation mêlée à un brin de malice. Cette manière de parler. Comme si elle n'avait peur de rien. Mais qui pourrait se vanter de n'avoir peur de rien ? Sûrement pas elle. Ses plus grandes peurs ? Risquer de n'être personne. Car malgré tout, elle aspire à de grande chose. Mais encore une fois, elle est lâche. Elle a besoin de repère même s'ils sont merdiques. Et ce qu'elle voudrait entreprendre demande de voyager en eaux troubles. C'est beaucoup trop lui demander. Se retrouver seule aussi. Elle est paumée la petite Nyméria et contradictoire. Il est compliqué de la comprendre. Très peu de gens y arrive. Ses frères font partit du lot, il partage les mêmes galères, plus ou moins. Son père malheureusement, il n'est plus amène de comprendre quoique ce soit. L'amour de sa vie la quitté pour un rêve. Sans un mot, sans une parole. Avec trois enfants. C'est un miracle qu'il ne soit pas partie lui non plus. Il n'est pas parfait, elle doit le reconnaitre. Mais, elle lui pardonne, car il est le seul parent qui lui reste et ce même s'il est exécrable en tant que tel. Bien qu'elle ne puisse s'empêcher de le blâmer pour bien des choses. Certes, stupide mais important à ses yeux. Elle aurait voulu avoir un père, un vrai. Le genre qui vient chercher ses gamins à l'école, qui sert le petit-déjeuner et qui offre des cadeaux à différente occasion. Au lieu de cela, elle était réveillée pendant son sommeil par la police, le ramenant ivre mort. Il dépensait son argent dans tous les spiritueux possibles et il était incapable de savoir quel jour était né chacun de ses enfants. L'amour l'a bousillée, devenant un cas désespéré. Pauvre de lui. C'est pour ça qu'elle n'y croit pas. En l'amour. Tout le monde finit par vous abandonner. Alors, pourquoi être assez fou pour s'infliger ce genre de supplice. Mais elle est humaine, alors de temps à autre son coeur loupe un battement sans qu'elle ne puisse rien y faire. Mais d'une manière ou d'une autre, elle finit toujours par souffrir. Alors, elle y renonce. C'est ce qu'elle se dit du moins. Parce que personne n'est à l'épreuve de cela, pas même elle.  

Aux yeux de la loi, elle n'est qu'un numéro, qu'un dossier et rien d'autre. Pourtant, Nymeria voulait être bien plus. Elle voulait être quelqu'un. Et c'est en courant après ce souhait des plus utopiques qu'elle s'est retrouvée entre quatre murs, plongeait dans un silence glacial.

Elle voulait être quelqu'un mais, en réalité elle n'est personne. Et elle l'apprit à ses dépens. Elle l'avait rencontré un soir d'automne, alors qu'elle fumait un joint avant de rentrer chez elle. Observant le monde de son regard si arrogant, elle porta la roulée jusqu'à ses lèvres afin d'aspirer une bouffée de ce si délectant mélange qu'étaient le tabac et la Marie-Jeanne. C'est à ce moment qu'elle le vit. Ses yeux posés sur elle, la défiant presque du regard. Ses lèvres à demi retroussée, un brin narquois. Sa peau diaphane ornait de milliers de grains de beauté. Son cœur oublia un battement. Puis un deuxième quand, il s'avança vers elle.

Sans un mot, il tendit sa main vers la sienne et attrapa délicatement le teh avant de tirer une taf. Et elle ne dit rien, se contentant de l'observer. Et de calmer son organe vital qui menaçait de foutre le camp. Son attitude si nonchalante la fit succomber. Elle savait qu'elle allait le regretter, elle le savait. Pourtant, elle se surprit elle-même en cédant à la tentation.

Elle n’est rien d’autre qu’un numéro, un dossier tout au plus. Mais il faut s'investir un peu plus sur ce foutu dossier pour comprendre la raison de sa présence. Car cela ne se résume qu’à un seul mot. Lazzlo.

Il s'appelle Lazzlo et tout est de sa faute. À vouloir refaire le monde, on se perd dans ses rêves. À vouloir trop rêver, la vie nous file entre les doigts. Et quand la vie nous file entre les doigts, c’est à ce moment qu’arrive le point de non-retour. C'est là que l'on comprend enfin que l'on n'a plus rien perdre. À ses côtés, elle se sentait puissante. Elle se sentait vivre, chose qui n'était pour ainsi dire… Jamais arrivée. Et entraînée dans la spirale de SA folie, elle comprit alors qu'elle n'était pas la seule à être abîmée par la vie. Lui aussi avait des séquelles. Alors, elle se promit de tous faire pour les combler. Elle voulait être quelqu'un, elle voulait être son « tout ». C’était son point de non-retour.

Elle aurait dû dire non, elle le savait. Mais l'idée de flirter avec le danger la séduit, faisant chavirer sa raison. Alors, le défiant du regard, elle accepta.

Trap queen, coffreuse, nourrice. Il y a des multiples synonymes pour ce petit délit. Elle se les répète inlassablement, se demandant par la même occasion, pourquoi elle ne s'est pas contentée de cela. Parce qu'il faut savoir une chose, c'est que Nymeria est gourmande. La sensation que procurait l'ivresse du danger la changea. Elle en voulait plus toujours, plus. Si bien qu'après avoir volé si près du soleil, elle est tombée. Ses ailes de cire étaient à présent partie en fumée. Comme sa vie.

Bandit, malfrat, délinquant. Elle voulait être quelqu'un, elle croyait l’être à ses côtés. Le jour où elle l'a rencontré deux possibilités s'offraient à elle. Celle de l'ignorer et celle qu'elle a choisie.
Elle se sent conne et chanceuse. Parce que maintenant elle est là mais, elle sait que cela aurait pu être bien pire.
Crime en bande organisée, cambriolage et impliquée dans une histoire de règlement de comptes. Voilà pourquoi elle avait été placée. Bien que si quelqu'un lui demandait la raison, elle n'aurait qu'un seul mot à dire.

À son arrivée, elle s'était détestée. Hait même. Pour avoir été si faible, si naïve. De ne pas être parti le jour de sa rencontre. Elle savait ou menait l'amour, à la solitude et à la souffrance. Ses parents étaient un exemple parmi tant d'autres. Alors, pourquoi ? Pourquoi n'avait-elle pas pu protégeait son cœur de cette tragédie.

À cause de sa phrase emplie d'arrogance.

-Essaye d'apprendre à me connaître si tu l'oses.

Nymeria avait essayé et avait cru réussir. Une fois de plus, elle s'était leurrée. Et plus grande était sa déchéance quand elle sut qu'il l'avait trahi. Ce qui n'était rien comparé à sa stupeur, quand elle vit dans les murs de ce centre. Le regard malicieux, Lazzlo sait. Malgré l'aversion qu'elle porte à son encontre, il sait que rien n'est perdu.

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